A l’heure où, s’ajoutant à la Malaria, au Sida, à la rougeole, à la fièvre Ebola…se développe en Afrique comme partout ailleurs sur la planète terre, la pandémie du nouveau coronavirus ; à l’heure où des chefs d’Etat incompétents et désarmés, visiblement pris de panique ; à l’heure où enfin, Paris , inquièt pour ses intérêts à terme en Afrique, décide de convoquer des chefs d’état africains à Paris, d’aucuns seraient, en effet, en droit de se demander : pourquoi venir parler ici de refinancement de l’Afrique ? et qui dit refinancement dit forcément dette.
Parlant justement de la dette africaine, – dette immorale et amorale, car contractée dans des conditions généralement malhonnêtes par des régimes dictatoriaux- , qui a pratiquement triplé entre 2006 et 2019 selon une études conduite par le trésor français, il est d’une nécessité impérieuse que les dirigeants africains aient le courage de dénoncer les accords coloniaux qui constituent un véritable frein au développement du continent.
Mais au-delà de la question de refinancement du continent africain, la France, par ce sommet de Paris, vise visiblement à maintenir la mainmise française, soixante ans après les Indépendances, sur le continent africain dont les richesses continuent d’être exploitées allègrement. Il faut bien évidemment sauvegarder les intérêts de Total, AREVA, Bolloré, Bouygues etc.
En clair, ce New deal ne profiterait guère ni aux paysans de kara au Nord-Togo ni aux cultivateurs de café à Ngula au sud-Kivu. Oui ! tous ces « chefs d’etat » fantoches le savent bien et ne font qu’asservir les populations pour mieux se servir et servir leurs maîtres.
C’est encore, ni plus ni moins, la prolongation du néocolonialisme surtout dans sa nouvelle phase de la reconquête du continent qui tend à leur glisser entre les mains cette dernière décennie avec l’arrivée de la Chine, de la Russie et surtout avec l’éveil de certains panafricanistes qui multiplient des actions contre la France coloniale.

Un New deal pour Macron…
Après le Programme d’aide au développement, après le programme d’ajustement structurel, après Initiative PPTE , c’est aujourd’hui avec un New deal, concept plagié du President américain Roosevelt que la France de Macron pense refaire son influence sur le continent africain. Tout le monde sait qu’à un an des élections françaises, Macron est inconfortable sur le plan intérieur.
En grande perte de vitesse, le Président Macron se paye la tête des présidents africains à travers son New deal. Un New deal pour la France où pour l’Afrique ? L’Afrique ne reçoit que 5% de ces Dts. Qui reçoit alors les 95% restants ? Autant de questions que tentent d’expliquer certains économistes. Mais en réalité, L’opération n’est rien d’autre que de la com afin de remonter dans les sondages et de gagner le cœur des français. Aussi, Macron tente-il de refaire l’hégémonie de la France en Afrique surtout avec l’arrivée des autres puissances impérialistes, au premier rang desquelles se trouvent la Chine et la Russie, la Turquie …. Alors il tente une nouvelle fois de rendre incontournable l’État français dans les affaires africaines.
Il faut par ailleurs signaler que l’autre enjeu de ce sommet, c’est le Soudan.
L’Hexagone lorgne sur les opportunités d’investissements dans les secteurs pétrolier et aurifère du pays. Ainsi, la France va devoir convertir ses créances odieuses en investissements dans le cadre d’un contrat dit de désendettement et de développement. Il faut rappeler que la BNP Paribas, toujours très proche de l’État français, avait été condamnée à une amende de 6,6 milliards d’euros pour avoir violé l’embargo étasunien et financé la guerre au Darfour.
Il faut être clair. Le New deal que Macron pourrait envisager pour l’Afrique, c’est de ne plus s’ingérer dans les affaires africaines et d’arrêter hic et nunc la françafrique.

Toujours la françafrique …
En effet, la Françafrique ne se résume pas à une image. Elle est une réalité politique, institutionnalisée de longue date, faite de corruption d’élites marionnettes, de spoliations et de pillages organisés, planifiés, légiférés, subie par les peuples d’Afrique, depuis des décennies !
Et puis enfin, soyons sérieux, qui, du port de Cotonou à celui de Yaoundé, de celui de Lomé à celui d’Abidjan, autant de structures, parmi d’autres, dont il s’est rendu propriétaire, pourra changer « l’image » de Bolloré en Afrique ? Pour être clair, le monopole du fret maritime sur toute la façade atlantique ajouté à celui du transport vers tout l’Interland, c’est très exactement cela  la Françafrique ! C’est même 100% la Françafrique en plein essor !
Alors qui, comme pour Bolloré, pourra transformer les Bouygues, les Pinault et Cie en gentils « acteurs du co-développement » ? Qui, concernant uranium et pétrole, changera la nature prédatrice de Total et d’Areva ? Qui pour faire cesser l’exploitation franco-française du manganèse, du cobalt, du coltan, de l’or, des diamants, du bois, du cacao, du coton, de l’huile, de l’arachide, de la banane ?

Et pourtant, c’est le virus des inégalités…
Selon les rapports de l’ONG Oxfam, le nouveau coronavirus profite au capitalisme : licenciements abusifs, baisse énorme des salaires, baisse des coûts de production, lois liberticides…
Cette crise met en relief « comment notre système économique biaisé permet à une élite d’ultra-riches d’amasser des richesses considérables pendant la récession la plus dramatique que nous ayons connue depuis la Grande Dépression, alors que des milliards de personnes ont du mal à joindre les deux bouts ». L’effet néfaste de la pandémie sur les inégalités économiques reste plus accru qu’il ne l’était avant la covid19 .
En effet, les dix hommes les plus riches du monde ont vu leur fortune totale augmenter de plus de 500 milliards de dollars depuis le début de la pandémie alors que, inversement le nouveau coronavirus a entraîné la crise de l’emploi la plus grave depuis plus de 90 ans, des centaines de millions de personnes étant désormais au chômage ou occupant des emplois précaires ou contraints de travailler depuis leur domicile.
Grossomodo, les inégalités tuent et l’énorme fossé entre riches et pauvres est aussi dévastateur que le virus lui-même. C’est d’ailleurs pourquoi Oxfam qualifie cette pandémie de « virus des inégalité ». Plus de deux millions de personnes sont mortes. Des centaines de milliers de personnes ont perdu leur emploi et basculent directement dans la pauvreté. Alors qu’il a fallu seulement 9 mois aux milliardaires pour retrouver leur niveau de richesse, les plus pauvres mettront plus de 10 ans pour retrouver leur équilibre financier.
En clair, cette pandémie a mis à nu notre fragilité collective et l’impossibilité voire l’incapacité de notre économie extrêmement inégale à être au service de tous.

Par Romauald Boko